Retour aux articles

Articulation entre SAGE et autorisation administrative : le Conseil d’Etat précise la notion de « compatibilité »

Public - Environnement
Environnement & qualité - Environnement
02/04/2020
Dans le cadre d’un contentieux relatif à une autorisation d’exploitation d'une centrale hydroélectrique, la haute juridiction précise l’office du juge dans son appréciation du rapport de compatibilité entre des documents de planification et un acte administratif.
Un arrêté préfectoral du 6 mai 2013 a autorisé l'exploitation d'une centrale hydroélectrique sur le sous-bassin versant de La Bonne. Une fédération de pêche et une association de protection des milieux aquatiques ont attaqué cet arrêté. Le tribunal administratif a rejeté leur demande mais la cour administrative d’appel a annulé ce jugement. L’exploitant se pourvoit en cassation de cet arrêt d’appel.

Pour rappel, aux termes des article L. 212-1 du code de l'environnement et suivants, le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) peut être complété, pour un périmètre géographique donné, par un schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) qui comporte un plan d'aménagement et de gestion durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques (PAGD) et un règlement.

En l'espèce, le Conseil d’état à répondre à deux problématiques : d’une part, celle du régime applicable aux SAGE en cours d’approbation au moment de l’adoption de la loi du 30 décembre 2006 sur l'eau, et d’autre part, celle du rapport de compatibilité ou de conformité d’un arrêté d’autorisation avec un tel document de planification.
 
La haute juridiction rappelle qu’en vertu du XI de l'article L. 212-1 et de l'article L. 212-5-2 du code de l'environnement, les décisions administratives prises dans le domaine de l'eau doivent être compatibles avec :
  • le SDAGE ;
  • et le PAGD du SAGE qui complète le SDAGE le cas échéant.
En revanche, les décisions administratives prises en application des articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement doivent, quant à elles, être conformes au règlement du SAGE et à ses documents cartographiques, dès lors que les installations, ouvrages, travaux et activités en cause sont situés sur un territoire couvert par un tel document.
 
Quant aux dispositions transitoires, permettant d’accompagner les schémas en cours d’approbation lors de l’adoption de la loi sur l’eau, le Conseil note que les dispositions de l'article L. 212-10 du code de l'environnement permettent aux SAGE déjà approuvés ou en cours d'élaboration, de relever du nouveau régime applicable aux SAGE. Il ne résulte d'aucune disposition qu'un SAGE ainsi approuvé et constituant dès lors un PAGD cesserait d'être applicable faute d'avoir été complété par un règlement. En l’espèce, le SAGE du Drac et de la Romanche a été adopté dans le délai prévu mais sans être complété par un règlement. Il a néanmoins valeur de PAGD pour les sous-bassins considérés

Il résulte de ces éléments que les décisions administratives prises dans le domaine de l'eau sont  soumises à une obligation de compatibilité à l'égard du SAGE du Drac et de la Romanche, et non de conformité.
 
Pour apprécier cette compatibilité, il appartient au juge administratif  " de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire pertinent si l'autorisation ne contrarie pas les objectifs et les orientations fixés par le schéma, sans rechercher l'adéquation de l'autorisation au regard de chaque orientation ou objectif particulier ". Ce n’est pas ce qu’a fait la cour d’appel, en retenant que l’un des objectifs spécifique du SAGE interdisait tout nouvel aménagement hydroélectrique sur le sous-bassin considéré.
 
En se fondant sur l’inadéquation de l'arrêté litigieux avec un objectif particulier du SAGE et non sur une analyse globale à l'échelle du territoire pertinent et au regard de l'ensemble des objectifs et orientations fixés par le schéma, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit. Son arrêt est annulé.




 
Source : Actualités du droit