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Succession : requalification d’une donation de contrat d’assurance sur la vie

Civil - Personnes et famille/patrimoine
02/12/2019
En l’absence de renonciation expresse à l’exercice de son droit de rachat, le souscripteur ne fait pas de donation indirecte de son contrat d’assurance sur la vie.
Les faits
Un couple marié passe du régime de la séparation de biens à celui de la communauté universelle. Après le décès de son mari, l’épouse soutient que Madame C., avec laquelle celui-ci entretenait une relation adultère, a bénéficié de fonds de la communauté ; elle l’assigne pour en obtenir restitution. Madame C. avait en effet bénéficié de plusieurs donations ainsi que de deux contrats d’assurance sur la vie.

Les juges du fond prononcent la nullité de toutes ces donations.

La solution

Provenance des fonds. - La Cour de cassation approuve la cour d’appel sur le premier moyen du pourvoi de Madame C. Elle rappelle que « ne sont pas valables les libéralités consenties par un époux commun en biens au moyen de sommes provenant de ses gains et salaires lorsque ces sommes ont été économisées ». Or, l’arrêt relève que les deux chèques avaient été tirés sur deux des comptes personnels du défunt, lesquels avaient été alimentés par des virements provenant pour l’un, du rachat d’un contrat d’assurance sur la vie et pour l’autre, de la liquidation d’un compte-titre ouvert au nom des deux époux. Donc, même si certains de ces fonds provenaient de gains et salaires, ils étaient devenus des économies. En application de l’article 1422 du Code civil, ces donations consenties sans l’accord de l’épouse devaient être annulées.

Requalification des contrats d’assurance sur la vie. - En revanche, la Haute juridiction casse l’arrêt sur le second moyen. Vu les articles L. 132-9 du Code des assurances (dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007), L. 132-21 du même Code, ensemble l’article 894 du Code civil, « en l’absence de renonciation expresse de sa part, le souscripteur d’un contrat d’assurances sur la vie mixte est fondé à exercer le droit de rachat prévu au contrat, même en présence de bénéficiaires ayant accepté le bénéfice du contrat ». La cour d’appel avait requalifié les contrats d’assurance sur la vie que le défunt avait souscrit au bénéfice de Madame C. en donations indirectes, estimant cette requalification possible lorsque les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable. Selon elle, telle était le cas dans cette affaire car ce dernier était alors privé de toute possibilité de rachat. L’époux et Madame C. avaient signé une lettre par laquelle ils demandaient à l’assureur d’enregistrer l’accord de Madame C., bénéficiaire acceptante des contrats d’assurance. Celui-ci ayant consenti à cette acceptation, il s’est dépouillé irrévocablement de sorte que les contrats doivent être requalifiés en donation indirecte.
La Cour de cassation estime au contraire que, sans constater une renonciation expresse du souscripteur à l’exercice de son droit de rachat garanti par le contrat, les juges du fond avaient violé les textes précités.
Source : Actualités du droit